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Palmyyyyyre !

Publié le par Mateo

« Il faut sauver Palmyre » (LE MONDE | 22.05.2015 à 13h49) / La nouvelle de la prise quasi totale de la ville par l’Etat islamique, mercredi 20 mai, fait craindre que ce joyau inestimable de la culture, dont la Syrie a été la gardienne, ne disparaisse purement et simplement devant la furie destructrice de Daech.

Etc... etc...

Quelque chose me choque dans ces cris d’orfraie depuis quelques jours… Palmyre ! Palmyre ! Palmyre !... Quelque chose qui me lasse et m’agace… Palmyre… ruines… détruire… Oui, certes. Est-ce si grave ? Ce qui me choque, serait-ce que l’on s’alarme de la mort de vieilles pierres quand meurent de jeunes enfants ? Peut-être. Mais pas seulement, pas principalement.

Il y a autre chose. Il y a un mensonge là-dessous, quelque chose de foncièrement malhonnête. Ou bien est-ce l’ignorance. Il me semble qu’en pleurant Palmyre (car il faut pleurer Palmyre) on pleure une perte, la perte d’un capital, d’une possession, d’une richesse matérielle comptabilisable… L’art est voué à la destruction. Temps, barbares ou bactéries, l’œuvre d’art meurt. Cette manie de conserver les momies… pourquoi faire si ce n’est pour apprendre à vivre et à créer ? Qu’est-ce qui vaut ? Cette accumulation de pierres ou ce qu’elle nous dit, ce qu’elle nous apprend, ce qu’elle insuffle ? Cette beauté, cette énergie l’entendons-nous ? Sommes-nous capables de saisir et d’accepter ce qu’elle exige de nous ? On dirait bien que non puisque nous pleurons la perte comme si nous ne savions, comme si nous ne pouvions plus créer. Alors qu’importe que périsse une boîte vide.

La vie s’est-elle arrêtée ? On aimerait. L’art muselé ? On essaye. Tout vendu à vendre ? Presque. « Et pleure Palmyre, il faut pleurer Palmyre.

– Je pourrais peut-être créer moi aussi, créer à mon tour, célébrer la vie, changer la vie ! Je pourrais…

- Pleure Palmyre !

-Je sens frémir en moi l’âme de Palmyre, je crois que je peux vivre aimer créer…

- N’y pense pas ! Tais-toi et ne parle plus devant moi de cette chose qu’on ne mesure pas, cet impalpable insupportable, ce non-comptabilisable, cette non-marchandise c’est… c’est affreux, c’est la vie, quelle horreur! Tais-toi ! Et pleure Palmyre ! À genoux ! Baisser la tête et pleure Palmyre !

 

Aujourd’hui, Palmyre n’est pas détruite, il faut donc seulement trembler pour Palmyre, tremblons donc. Mais que fera-t-on si Palmyre n’est pas détruite ? Quel embarras… Retourner vaquer à notre servitude… Et Palmyre ? Qu’en faire ?